Actualités

Art et Bâtiment

Fondation
Wittenbach

Est-ce de l’art ou peut-on s’en débarrasser?

Suite au décès de Bruno Stefanini, sa fondation, la Stiftung für Kunst, Kultur und Geschichte (SKKG), a hérité d’une collection de 100’000 objets et de quelque 2200 appartements. Créer un lien entre le patrimoine culturel et les biens immobiliers? Défi accepté! Les projets « Art et Bâtiment » mis en œuvre conjointement par la SKKG et la société Terresta constituent une étape importante vers la réalisation d’un objectif commun: associer la Fondation à vocation culturelle et son portefeuille immobilier dans un souci d’efficacité.

La SKKG assure l’entretien de sa Collection de biens culturels et en favorise l’accessibilité au public, tout en aidant les musées suisses à intégrer, dans leurs activités courantes et dans leurs expositions, la promotion du partage et de la participation sociale. La Fondation finance ces activités par les revenus qu’elle tire de son portefeuille immobilier, lequel a été constitué progressivement par Bruno Stefanini entre 1946 et 2018, année de sa disparition. Tous ces biens immobiliers, dont 2200 appartements, 200 espaces commerciaux et 60 terrains non construits, sont gérés et développés de manière durable et socialement responsable par la société Terresta Immobilien und Verwaltungs AG

Jusqu’au décès de Bruno Stefanini, la SKKG et Terresta ont certes été pilotées d’une seule main, mais elles n’avaient que peu de points en commun sur le plan de leur organisation et de leur objet. Durant ces quatre dernières années, elles se sont rapprochées et elles partagent même désormais une vision commune sous le thème « Loyers équitables et culture pour tous: repenser le vivre-ensemble ». Cette vision recèle leur conviction partagée que l’identité, la culture et l’espace se conditionnent mutuellement et qu’ils sont intimement liés.

Terresta préserve, développe et loue des biens culturels construits; la SKKG prend soin du patrimoine culturel matériel de sa Collection et elle s’engage en tant que partenaire aux côtés des musées suisses. Au niveau de l’immobilier, l’art devra prendre une place plus importante, prééminente même, dans les nouvelles constructions et les projets de rénovation d’une certaine ampleur. « L’objectif est de donner une visibilité à l’art au sein de notre parc immobilier, d’encourager la création artistique et de faire participer un public divers à des valeurs culturelles, conformément à l’objectif de la Fondation. » Telle est la résolution prise par le Conseil de fondation de la SKKG en 2020.

Müselet

Le ludique et l’insolite à la Waldeggstrasse

Vor weissem Hintergrund steht eine Tierskulptur aus Draht, daneben liegt ein Korken von einem Champagner.

Sur un terrain jusque-là non construit de la Waldeggstrasse à Winterthur-Seen se dressent aujourd'hui deux nouveaux immeubles d'habitation comprenant 32 appartements au total. C’est la première nouvelle construction de Terresta depuis 50 ans. Pour le projet « Art et Bâtiment » de la Waldeggstrasse, une procédure classique a été choisie: Sur invitation d'un jury d'experts, des créateurs et créatrices d’art sélectionné-e-s ont soumis leurs idées pour une œuvre autonome conçue spécialement pour le lieu. L'objectif était de favoriser l'identification des habitant-e-s avec leur nouveau quartier.

Le projet gagnant a pour nom «Müselet» et est signé Christian Gonzenbach. C’est une sculpture de 7 mètres de haut en tube d'acier représentant un animal. Le tout est parti de l’armature en fil métallique d’un bouchon de champagne, agrandie cent fois. Le jury a été séduit par « l'aspect ludique, le plaisir insolite – la réutilisation d'un bouchon de vin mousseux, idée née de l'instant et qui renvoie à un aspect important de l'art: la possibilité d'inventer une narration magique et surprenante à partir de rien. » La population locale, en particulier les enfants de l'école maternelle située en face des nouveaux bâtiments, a été impliquée dans le processus de mise en œuvre.

Mettre la main à la pâte à Wittenbach

Normalement, le personnel du service Bâtiments de Terresta fait disparaître aussi vite que possible les graffitis des murs. Mais dans le cas présent, il a non seulement choisi la fresque murale de 8 mètres sur 12,3, mais il a même demandé à ses collègues du service Peinture de réaliser l'œuvre dans le cadre d’un important projet de rénovation. En effet, pour décorer la façade d'un immeuble d'habitation et commercial à Wittenbach, le jury amateur composé de collaborateurs et collaboratrices du service Bâtiments a choisi le projet de Jessica Russ

La proposition de cette artiste a convaincu l’équipe de Terresta par son langage visuel contemporain et par ses couleurs qui rendent l'œuvre bien visible depuis la route cantonale. Ce projet réalisé en interne a renforcé la cohésion entre les départements au sein de la SKKG et de Terresta. Il a contribué à une meilleure compréhension mutuelle et à une plus grande appréciation des tâches effectuées tant au sein de la Fondation culturelle que de la gestion immobilière.

Wittenbach
Künstlerin Jessica Russ bespricht die Farbpalette mit Jorge Martinez, Leiter Maler Terresta.
Wittenbach Drohnenaufnahme
Wittenbach

© Nelly Rodriguez

La Collection et l’habitation se mettent à dialoguer

Steinberggasse

Voici une maison chargée d’histoire: située au cœur de la vielle ville de Winterthour, à la Steinberggasse 52, elle a en outre abrité pendant de nombreuses années le bureau personnel de Bruno Stefanini et une partie de sa collection. En 2023 et 2024, elle a fait l’objet d’une rénovation complète, suite à laquelle des espaces artisanaux et gastronomiques ont vu le jour au rez-de-chaussée, 15 appartements locatifs ont été créés dans les étages et un ensemble de logements destinés à la cohabitation a été réalisé sous les toits. Une équipe de projet s’est constituée en interne autour de Simone Müller pour demander à une sélection de créateurs et de créatrices d‘art d’élaborer une idée de projet sur la base d’objets concrets faisant partie de la Collection de la SKKG. Une sorte de patrimoine culturel immatériel était recherchée, quelque chose qui soit intimement lié non seulement à la Collection mais aussi au bâtiment. 

Le jury était composé de membres de la Direction de la SKKG et de Terresta, ainsi que de la directrice du Gewerbemuseum Winterthur, Susanna Kumschik. Son choix s’est porté sur le projet intitulé « Chumm doch ine » de Claudia Kübler. Son idée: les locataires de la Steinberggasse 52 définissent chaque année un thème qui présidera ensuite au choix de certains objets de la Collection de la SKKG, lesquels seront exposés dans des casiers spécifiques de leur immeuble. Les locataires pourront et devront également placer des objets personnels dans ces présentoirs, objets destinés à entrer en dialogue entre eux et avec les objets de la Collection. Des messages pourront être glissés dans la boîte aux lettres du Fantôme des lieux et, la nuit, des projecteurs balayeront les murs de la cage d'escalier, suscitant reflets et ombres qui disparaîtront dès que quelqu'un allumera la lumière.

Le jury lui-même désigné au moyen d’un concours

Avant de pouvoir émettre leur avis sur les projets soumis au concours «Art et Bâtiment» concernant le petit parc qui entoure les deux immeubles de la Zypressenstrasse à Winterthur-Wülflingen, les membres du jury devaient tout d’abord se soumettre à une sélection. En effet, dans une procédure ouverte, un appel avait été lancé aux artistes, curateurs et historiennes de l’art jouissant d’une expertise en art et en construction afin qu’ils et elles puissent se qualifier pour devenir membres du jury. Cet appel à candidatures était concomitant à l’appel d’offres visant la soumission d’idées de projets. Cet « Open call » pour faire partie du jury a permis à la SKKG et à Terresta d’élargir leur réseau dans le domaine « Art et Bâtiment ». L'œuvre d'art recherchée devait enrichir l'espace extérieur et – tout comme le projet de construction lui-même – accorder une grande importance au thème de la durabilité écologique.

«Le donneur d'ordre part du principe que le monde de l'art a la possibilité de contribuer à une plus grande prise de conscience dans l’utilisation des ressources naturelles», indiquait l'appel d'offres qui s'adressait aux créateurs et créatrices d'art disposant d’une expérience dans les domaines du développement durable, du recyclage, de l'économie circulaire et de la neutralité climatique. Le jury a proposé de réaliser le projet soumis par Ester Alemayehu Hatle – cinq sculptures qui suivent le plan des bâtiments existant encore aujourd'hui à la Zypressenstrasse. Au sens figuré, les sculptures constituent ainsi une interface entre l'ancien et le nouveau, entre l'héritage et l'avenir. Elles ont été conçues à la manière d’interventions artistiques qui encouragent l'interaction et le jeu. Elles ont été formées à partir de chanvre et ont ensuite été façonnées avec de la chaux, du savon et de la cire. Toutes les sculptures présentent de petits trous qui serviront d'habitats aux abeilles et autres insectes.

Hatle

C’est de l’art - et l’on le conserve

Pour financer sa mission – préservation, entretien et médiation de biens culturels – la SKKG puise dans les revenus qu’elle tire des loyers perçus pour ses immeubles. Les œuvres d'art issues des projets « Art et Bâtiment » manifestent le lien qu’il est possible de créer entre l’objectif de la Fondation et son financement. Comment ce lien peut-il se révéler efficace? L'art créé ici s'intègre dans la vie quotidienne des habitant-e-s et fait l’objet d’un soin particulier de la part du personnel de la régie de l’immeuble. Ces interventions artistiques offrent ainsi un accès facile aux thématiques et aux questions soulevées en lien avec le patrimoine culturel. 

Qui sommes-nous en tant que société? Que voulons-nous? Quelles sont les valeurs que nous défendons, et comment pouvons-nous organiser ensemble notre vie commune? Dans le meilleur des cas, les œuvres d’art présentes sur les sites immobiliers appartenant à la SKKG et gérés par Terresta créent une sorte d’identité pour la communauté résidente et elles renforcent son sens du vivre-ensemble et de la cohésion. Dans tous les cas, elles attirent l'attention et elles suscitent des discussions sur la question de savoir où l'art s'arrête et où la vie commence, ou comment la vie devient de l'art.